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Quand Haïti déclare la guerre au coronavirus, la faim se manifeste

Le 9 décembre 1941, deux jours après l’attaque de Pearl Harbor, Haïti déclare la guerre à l’Allemagne d’Hitler, à l’Italie et l’Empire nippon. Précisant au peuple haïtien que la participation de leur pays à la Seconde Guerre mondiale ne sera pas symbolique, Elie Lescot, le président de l’époque, profite de l’occasion pour l’informer des restrictions et des sacrifices…

Nous connaissons tous un peu la suite de cette histoire : bien qu’elle ait accueilli plus de 300 familles juives fuyant le nazisme sur son territoire, Haïti n’a jamais pris part à ce conflit majeur et les Allemands ont été maîtrisés par les Alliés, en 1945.

Nul besoin de vous dire que la déclaration de guerre de Lescot a donné naissance à quelques moqueries envers Haïti, parmi lesquelles Hitler aurait promis de se servir du « petit État » comme une « grande écurie » pour ses chevaux après sa victoire en Europe.

D’une manière auto-dérisoire, plusieurs d’entre nous, y compris moi, continuons de rire de la désinvolture avec laquelle Haïti a défié le Führer.

Or, face à une adversaire aussi redoutable et sournoise que la COVID-19, frappant partout, aveuglément, sans distinction de race, il y a lieu de se demander comment Haïti va s’y prendre pour s’en sortir sans trop de dommage dans cette guerre sanitaire.

Le coronavirus et la pauvreté

Cependant, le jeudi 19 mars, c’est avec beaucoup d’inquiétude que nous avons accueilli la déclaration de guerre au nouveau coronavirus (COVID-19) du président de la République d’Haïti, Jovenel Moïse.

Le président Jovenel Moïse s’adresse à la nation

En effet, au vu de cette crise pandémique sans précédent, les projecteurs haïtiano-diasporiques sont naturellement braqués sur le chef de l’État, qui a fait part de son engagement dans cette mobilisation planétaire, voire « guerre mondiale », dont la devise est « chacun pour soi », dans un point de presse donné au Palais national.

Or, face à une adversaire aussi redoutable et sournoise que la COVID-19, frappant partout, aveuglément, sans distinction de race, il y a lieu de se demander comment Haïti va s’y prendre pour s’en sortir sans trop de dommage dans cette guerre sanitaire.

On se demande comment un gouvernement qui ne parvient pas à contrôler les bandes criminelles du pays, qui perturbent la tranquillité et le sentiment de sécurité des citoyens, pourra venir à bout d’un virus qui a tué plus de 28 000 personnes à travers le monde au cours des trois derniers mois.

Enfin, on se demande si la première république noire possède les armes et les munitions requises pour combattre simultanément la faim et la COVID-19.

D’ailleurs, un bon nombre de citoyens ont exprimé le souhait d’être emportés par le virus mortel plutôt que de mourir de faim.

Le confinement quand on a le ventre vide

« Alea jacta est », semblent vouloir dire ces gens pour qui l’apparition de la pandémie de coronavirus sur la terre de Dessalines n’est qu’une continuité des catastrophes qui ne cessent de mesurer leurs limites humaines.

« Si nous sommes confinés à la maison, ce n’est pas le coronavirus qui va nous tuer, mais bien la faim et la misère », a martelé avec colère une commerçante de rue, dénonçant l’État haïtien pour son inaction en ce qui concerne les soutiens financiers qui encourageraient le confinement.

En fait, les Haïtiens n’ont plus confiance en Jovenel Moïse, qui leur avait pourtant promis mer et monde durant sa campagne électorale, en 2015. Ainsi donc, ils profitent de cette malheureuse occasion pour manifester leur mécontentement à l’égard des turpitudes de leur gouvernement qui ne met rien dans leur assiette.

Et sans vouloir revisiter Vertières, ressusciter ses valeureux ancêtres et revivre les 35 secondes infernales du 12 janvier 2010, force est de reconnaître que de belles batailles ont été remportées par ce « petit » peuple qui est souvent laissé à lui-même.

Un jour, Pythagore, le philosophe grec, a dit : « Il n’existe que cinq choses contre lesquelles il faut se battre : les maladies et les passions du corps, l’ignorance, les guerres civiles et les disputes de famille ».

Le ras-le-bol du peuple haïtien

Or, dans le cas du peuple haïtien, bien que son niveau de scolarité soit faible, je refuse d’associer son comportement « je-m’en-foutiste » à l’endroit de cette maladie qui le guette à l’ignorance. Il serait beaucoup plus approprié de parler de lassitude et de ras-le-bol.

Car, voyez-vous, les Haïtiens se battent constamment. Autrement dit, Haïti est un champ de bataille.

Et sans vouloir revisiter Vertières, ressusciter ses valeureux ancêtres et revivre les 35 secondes infernales du 12 janvier 2010, force est de reconnaître que de belles batailles ont été remportées par ce « petit » peuple qui est souvent laissé à lui-même.

Toutefois, son talon d’Achille a toujours été la pauvreté.

En chassant Jean-Claude Duvalier et ses Tontons macoutes, en 1986, les Haïtiens pensaient avoir fait d’une pierre deux coups, c’est-à-dire vaincre la dictature et la pauvreté, mais en vain.

Rien n’a changé dans la situation haïtienne : la corruption des dirigeants politiques d’Ayiti Toma sape les bases de la démocratie.

Haïti déclare la guerre au coronavirus

Dans un pays où deux tiers de la population sont touchés par le chômage, la misère et l’incertitude règnent de manière endémique.

La présence du coronavirus en Haïti met en lumière la dysfonction de l’État, qui ne peut répondre aux besoins primaires de la population, tels que les droits à l’éducation, à la santé et au travail.

Quelle tristesse!

En conclusion, malgré tout, je suis persuadé que le peuple haïtien finira par respecter les consignes des autorités et que la COVID-19 sombrera dans un sommeil profond dans le berceau de la Résilience.

Et j’espère qu’une victoire planétaire sur la COVID-19 nous permettra de constater que si nous pouvons battre un ennemi que nous ne percevons pas, nous pourrons alors vaincre la faim, qui est visible par la souffrance de ceux qui la connaissent.


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Auteur

Gagnant du prix Rédacteur (rice) d’opinion aux Prix Médias Dynastie 2022, Walter Innocent Jr. utilise sa plume pour prendre position, dénoncer et informer. Depuis 2017, il propose aux lecteurs du magazine Selon Walter une analyse critique de l'actualité.

1 Commentaire

  1. La chloroquine tel que mentionnée par le professeur Didier Raoult de Marseille, pourrai sauver des vies en Haïti. Un produit pas cher mais bloqué par les politiciens. Peux-tu faire quelque chose pour le promouvoir?
    Merci

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