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Quand l’Haïtienne Naomi Osaka porte les Noirs sur ses épaules et gagne

Sans aucun doute, remporter l’US Open constitue un des exploits sportifs les plus difficiles à réaliser. Cependant, lorsqu’une jeune femme de 22 ans parvient à triompher à ce tournoi prestigieux en portant les problèmes sociaux de son peuple sur son dos, il ne s’agit plus d’exploit sportif, mais d’acte héroïque…

Samedi dernier, le 12 septembre, en fin d’après-midi, plusieurs d’entre nous étaient rivés devant leur écran de télé afin d’être témoins du deuxième sacre de Naomi Osaka aux Internationaux des États-Unis.

Dans l’Amérique noire, l’US Open de 2020 était considéré comme un événement sportif d’importance capitale, et sa légende s’articule autour de la volonté d’Osaka de démasquer et d’extirper les turpitudes de la société américaine en défilant sur les courts du Flushing Meadows avec sept masques – un par match jusqu’à la finale – chacun portant le nom d’une personne noire victime de violences policières ou racistes.

Promesse tenue

De manière générale, l’objectif a été atteint et la promesse tenue : sept matchs gagnés pour Breonna Taylor, Elijiah McClain, Ahmaud Arbury, Trayvon Martin, George Floyd, Philando Castile et Tamir Rice.

Durant ces deux semaines de marathon d’effort surhumain, Naomi ne s’est pas comportée en Samouraï protégeant les intérêts du pays du Soleil levant, mais plutôt en Grenadière menant l’assaut contre le racisme et les injustices sociales.

Représentation des sept couvre-visages portés par Osaka

Qui dit mieux ?

Ou encore, qui a fait plus qu’Osaka en matière d’acte d’héroïsme depuis les célèbres poings gantés de noir de Tommie Smith et John Carlos, qui ont redéfini la notion du militantisme dans le sport, aux Jeux Olympiques de Mexico, en 1968 et le genou à terre de Colin Kaepernick en 2016 ?

À ce sujet, il est impossible de savoir ce qu’en pensent les nombreuses célébrités afro-américaines qui préfèrent compter leurs « billets verts » plutôt que de s’impliquer dans la cause noire, mais nul ne peut douter du leadership et de l’engagement militant sur le terrain et en dehors du terrain de l’Haïtiano-Niponne.

Durant ces deux semaines de marathon d’effort surhumain, Naomi ne s’est pas comportée en Samouraï protégeant les intérêts du pays du Soleil levant, mais plutôt en Grenadière menant l’assaut contre le racisme et les injustices sociales.

Fière d’être noire

Contrairement à d’autres stars telles que Tiger Woods et Neymar, où il existe une ambiguïté autour de leur identité ethnique, la lauréate de l’US Open 2020, native de la ville d’Osaka, au Japon, a toujours revendiqué son haïtiannité et son africanité.

D’ailleurs, à la suite de l’affaire Jacob Blake, dans une de ses publications sur les réseaux sociaux, elle a écrit : « avant d’être une athlète, je suis une femme noire ».

Elle représente un modèle pour les jeunes Noirs, tout comme ses ancêtres Jean-Jacques Dessalines et Toussaint Louverture ont été une source d’inspiration et d’espoir pour les esclaves.

Et, sur Twitter, dimanche, la reine de New York a déclaré ceci : « Je tiens à remercier mes ancêtres car chaque fois que je me souviens que leur sang coule dans mes veines, je me souviens que je ne peux pas perdre ».

Quiconque est Haïtien comprendra que dans ce puissant message à la société, Naomi Osaka, dont le père est originaire de Lakay, exalte les hauts faits de Capois-la-Mort à Vertières, ainsi que ceux d’autres héros de la première République noire, qui refusaient de vivre dans l’opprobre et dans l’ignominie.

Le « beau risque »

Selon le magazine Forbes, Naomi est devenue la sportive la mieux payée de l’histoire, avec 37 millions de dollars empochés en 2019.

Cette richesse serait suffisante pour inciter l’athlète de 22 ans à ne pas exprimer ses opinions sur le mouvement « Black Lives Matter » tout en se complaisant par mimétisme dans ce monde blanc et bourgeois que représente le tennis.

Plutôt que d’enprunter le chemin le plus facile, elle a courageusement choisi la voie dessalinienne : fin mai, elle a soulevé le poing en soutien à George Floyd, et à la suite de l’affaire Jacob Blake, elle a boycotté la demi-finale du tournoi de Cincinnati.

Une athlète exceptionnelle, une activiste infatigable et déterminée.

Tout récemment, lorsqu’elle a encouragé les Japonais à participer à une marche pour soutenir le mouvement Black Lives Matter à Osaka, elle a été traitée de terroriste sur les réseaux sociaux.

Elle dénonce, proteste et agit, au risque d’être déshonorée par sa terre natale ou même d’être abandonnée par ses commanditaires, qui ne s’intéressent qu’à la couleur de l’argent.

N’était-ce pas un certain Colin Kaepernick qui a dit : « Croire en quelque chose même si cela signifie tout sacrifier » ?

Or, force est de reconnaitre que Naomi Osaka a fait des sacrifices personnels lorsqu’elle a transporté la réalité des Afro-Américains dans les courts du site de Flushing Meadows.

Nous devons tous tirer une leçon du courage et du dévouement de la talentueuse athlète.

Elle représente un modèle pour les jeunes Noirs, tout comme ses ancêtres Jean-Jacques Dessalines et Toussaint Louverture ont été une source d’inspiration et d’espoir pour les esclaves.

Et pour ceux et celles qui se posent la proverbiale question, à savoir si les personnalités noires ont l’obligation de se joindre à la Cause, la réponse est sans équivoque, c’est OUI !

En conclusion, après l’assaut final, la Grenadière s’est allongée sur le dos, sur la surface de jeu, les mains jointes, pour contempler le ciel et cogiter sur son parcours de sept matchs.

La route a été longue, avec de nombreux virages et des obstacles à surmonter.

Rendue à la finale, Naomi a porté sur ses épaules Tamir Rice, un enfant afro-américain de 12 ans qui a été tué par un policier blanc.

Face à une adversaire aussi redoutable que la Biélorusse Victoria Azarenka, elle aurait pu craquer sous la pression et tout laisser tomber, mais elle s’est dite : « je suis forte, assez forte pour porter Tamir, car He ain’t heavy, he’s my brother ».


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Auteur

Gagnant du prix Rédacteur (rice) d’opinion aux Prix Médias Dynastie 2022, Walter Innocent Jr. utilise sa plume pour prendre position, dénoncer et informer. Depuis 2017, il propose aux lecteurs du magazine Selon Walter une analyse critique de l'actualité.

5 Commentaires

    • Walter Innocent Jr Répondre

      Merci pour le compliment, Brigitte! J’apprécie grandement.

    • Walter Innocent Jr Répondre

      Merci beaucoup Brigitte! Elle est une Nippo-Haïtienne, donc… nous devons en être fiers, car c’est son père, qui est Hïtien, qui a été l’architecte de sa réussite.

      À bientôt !

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